dimanche 16 juin 2013


Vu Angel de Lubitsch, commencé avec 15 minutes de retard, ce qui n'arrangeait pas mes voisins qui ne voulaient pas rater le match de foot.
Ce que je remarque chez Lubitsch c'est que tout se passe sur une sorte de plan de sophistication, et en dessous, tout en dessous de ce plan, il y a les milles sacs de noeud du désir qui ne sont compréhensibles, lisibles, articulables qu'au seul niveau de ce plan de sophistication, qui est aussi un plan d'éloquence, d'élégance : ici l'élégance c'est le détour que l'on met à dire une chose, c'est une façon de la cacher en la dévoilant à la personne concernée.
Tout n'est jamais que traduit, dans les termes du petit théâtre appartement lubitschien.
La mise en scène elle aussi obéit à cette idée du sous-entendu : montrer une chose c'est en filmer une autre, dire une chose c'est en dire une autre, toujours des coups en décalé comme si expliciter c'était prendre le risque de se brûler : le film finit par ressembler à un rébus du désir. Et un rébus ce peut-être un code, un secret, pourquoi passer par le rébus ? Pour se faire comprendre d'une seule personne. Ce qui finit par créer une sorte de centre aveugle et tabou (de tout ce qui n'est pas dit, tout ce qui n'est pas montrer), de film brûlant autour duquel s'agence un film respectacle qui lui fait toujours référence.
C'est aussi l'idée (que suscite souvent le visage de Dietrich chez les cinéastes) de la passion appartenant au passé il suffit d'un regard pour remuer ce vieux souvenir, se brûler encore les doigts dessus : Dietrich ne veut pas entendre tel air de piano, tel détail de son séjour à Paris non pas tant parce qu'elle a peur que son mari découvre tout que parce qu'elle frémit de renouer avec cette vieille fièvre.

Sauf qu'ici le rébus ne marche pas, l'ancienne amante se refuse à la complicité du déchiffrage.
Ce qui est merveilleux dans le film c'est que ce n'est en fait pas une comédie romantique, pas un film non plus sur l'adultère, mais un film sur un couple qui se trouve face à un homme amoureux. Lui a cru être dans une comédie romantique, elle s'obstine au fond à lui dire qu'ils sont dans une comédie du remariage. Une comédie du malentendu, où le couple fait presque office d'analyste bienveillant pour le malheureux.
Preuve en est : le jeu de Dietrich est tout en évidence, sans opacité, elle récite clairement son texte, rien n'est traînant dans son jeu, aucune langueur, puisque l'amant est évacué.

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